Loi Badinter : Elle ne s’applique pas si le véhicule terrestre à moteur est à l’arrêt et qu’il est dans sa fonction outil.

Loi Badinter : Elle ne s’applique pas si le véhicule terrestre à moteur est à l’arrêt et qu’il est dans sa fonction outil.

Publié le : 15/01/2022 15 janvier janv. 01 2022

La loi du 5 juillet 1985, dite « loi Badinter », instaure le régime d’indemnisation en faveur des victimes d’accident de circulation, impliquant un Véhicule Terrestre à Moteur (VTM) comme une automobile, une pelle mécanique, un cyclomoteur, une tondeuse auto portée, etc. L’application de ce régime spécial nécessite la réunion de trois conditions : la présence d’un VTM qui est impliqué dans un accident de la circulation. 
En revanche, l’indemnisation peut être diminuée si la victime a commis une faute lors de l’accident. 

Dans une récente décision, la Cour de cassation vient préciser à nouveau le champ d’application de cette législation.

Lors d’une opération de moissonnage de ses champs, effectuée par une société sous-traitante, un exploitant agricole perd sa jambe gauche après être descendu dans la trémie (entonnoir renversé permettant le déversement des produits à traiter) de la moissonneuse-batteuse, afin de débloquer à l’aide d’un bâton, la vis sans fin, laquelle lui a arraché le membre après avoir happé ses lacets défaits. 

Ce mécanisme a pour seul objet de vidanger les grains introduits dans la trémie de stockage après leur récolte, et reste totalement indépendant de la fonction de déplacement de la moissonneuse-batteuse.

À la suite de cet accident, l’agriculteur assigne la société sous-traitante, la Mutualité sociale agricole Sud Champagne, ainsi que leurs assureurs. Mais, la Cour d’appel estime que la société sous-traitante n’est responsable qu’à hauteur de 50 % du préjudice qu’il a subi.

De plus, les juges refusent d’appliquer la loi Badinter, car ils estiment, après l’étude du dossier ainsi que des auditions des enquêteurs et du conducteur du véhicule, que le véhicule n’était pas en état de circulation au moment de l’accident, mais à l’arrêt et en position de maintenance de l’un de ses outils, en l’espèce la vis sans fin. 

Or, la victime conteste cette argumentation en affirmant, d’une part, que la fonction d’outil et la fonction de déplacement de la moissonneuse-batteuse sont indissociables, car la vis sans fin tourne grâce au moteur et uniquement quand il est en marche. D’autre part, l’exploitant considère que les juges n’ont pas chercher à vérifier si, au moment de l’accident, le véhicule était bien en circulation et en activité de fauchage. 

L’exclusion de la loi Badinter venant diminuer l’indemnisation de la victime, en mettant notamment hors de cause les deux assureurs précités, la victime forme alors un pourvoi en cassation.

Mais, la Haute juridiction juge l’arrêt comme valide, en estimant que « l’accident était exclusivement en lien avec la fonction d'outil de la moissonneuse-batteuse et aucunement avec sa fonction de circulation, dès lors que la machine ne se trouvait plus en action de fauchage, mais en position de maintenance de la vis sans fin et à l'arrêt ».

En conclusion, la Cour rappelle le cadre d’application de la loi Badinter, en faisant une interprétation stricte de la loi. Ainsi, pour bénéficier de ce régime d’indemnisation spécial, il faut que le véhicule terrestre à moteur soit nécessairement en circulation au moment de l’accident, peu importe que le moteur fonctionne ou non. 

Références de l’arrêt : Cass, civ. 2eme, 9 décembre 2021, n°20-14.254 et n°20-15.991
 

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