Action en réparation de l’aggravation d’un dommage corporel : la nécessaire reconnaissance de la responsabilité de l’auteur présumé
Publié le :
07/08/2024
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L’article 2226 du Code civil instaure un délai de prescription de 10 ans s’agissant de la possibilité de saisir les juridictions aux fins d’obtenir la réparation d’un préjudice corporel.
Il ajoute que le point de départ de ce délai court à compter de la date de consolidation du dommage initial ou aggravé.
La victime dispose alors de deux actions distinctes, mais encadrées chacune d’une prescription décennale.
Toutefois, l'indemnisation d'un dommage aggravé ne peut avoir lieu que si la responsabilité de l'auteur du dommage a été préalablement établie et de la présence d'un préjudice déterminé.
Une jurisprudence récente de la Cour de cassation vient illustrer ces conditions.
Dans cette affaire, un homme chute alors qu'il voulait monter dans un train. Son accident, qui s'est déroulé en 1980, lui a causé des amputations et des fractures.
À la suite d'un rapport d'expertise médical qui fixe la date de consolidation de son état de santé au 31 décembre 1982, ce dernier assigne la SNCF en responsabilité et en indemnisation en 2001.
À l'époque, le Tribunal de grande instance déclare sa demande irrecevable au motif qu’elle est prescrite.
La victime invoque une aggravation de son état de santé en 2008. C'est dans ce contexte qu'elle assigne à nouveau la SNCF en mai 2010.
En appel, sa demande est également déclarée irrecevable.
La victime se défend devant la Cour de cassation et invoque le fait que l'autorité de la chose jugée ne saurait faire obstacle à une demande de réparation d'éléments de préjudice non inclus dans la demande initiale (Cass, civ 2e. 29 mars 2012, n°11-10.235).
De même, elle avance que l'aggravation est un dommage nouveau donnant naissance à un droit à réparation distinct.
Il est ainsi prétendu qu’il s'agit d'une action autonome, dont l'exercice n'est pas subordonné à la condition que la responsabilité de l'auteur et que le préjudice, initialement indemnisé ou non, soient déterminés.
La Haute juridiction rejette son pourvoi en s'appuyant sur la combinaison de l’ancien 1351 du Code civil (nouvel article 1355), de l'article 480 du Code de procédure civile ainsi que de l'article 2226 du Code civil.
Elle rappelle, que l'autorité de la chose jugée fait obstacle à ce qu'une nouvelle décision soit rendue dans une affaire déjà jugée.
Mais surtout, la Haute juridiction juge que si l'article 2226 du Code civil prévoit un nouveau délai de prescription pour une action en indemnisation de l'aggravation d'un préjudice corporel, cette demande ne peut être accueillie que si la responsabilité de l'auteur prétendu du dommage a été reconnue.
Il s’agit simplement de la confirmation d’une ancienne jurisprudence (Cass, civ 1e. 14 janvier 2016, n°14-30.086).
En l’espèce, le jugement irrévocable du Tribunal de grande instance a déclaré l’action prescrite, de sorte que la responsabilité de la SNCF n’avait pas été établie, et que le préjudice, tant initial qu’aggravé, n’a pas été déterminé.
C’est donc à juste titre que la Cour d'appel a déclaré l’action en réparation du préjudice aggravé irrecevable, puisqu’elle porte atteinte à l’autorité de la chose jugée attachée au jugement et que la responsabilité de la SNCF n’a pas été préalablement reconnue judiciairement.
La SCP LEFEBVRE et THEVENOT vous conseille en cas d’aggravation de votre préjudice et vous accompagne dans le cadre de l’action en indemnisation de ce dernier.
Référence de l’arrêt : Cass, civ 2ème 21 mars 2024, n° 22-18.089
Historique
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